jeudi 8 janvier 2015

L’attaque terroriste de Charlie Hebdo : le 11-Septembre de la France (Art.265)



1. Il n’y a pas de mots pour qualifier l’attaque terroriste qui a frappé Charlie Hebdo le 7 janvier 2015. Quand j’ai appris cette triste nouvelle et j’ai visionné les vidéos qui circulent sur la toile de cette tuerie de sang-froid, les premières images qui me sont venues à l’esprit sont celles des attaques du 11 septembre 2001. Comme aux Etats-Unis, le terrorisme a frappé d’une manière spectaculaire, en plein cœur de Paris, et particulièrement odieuse, douze morts dont quatre grands noms qui ont marqué la France, Charb, Cabu, Wolinski et Tignous, et deux policiers, dont l’un d’origine arabe (précision utile par les temps qui courent), abattus avec une barbarie sans égale. Ce qui s’est passé hier à Paris ni pas moins que le 11-Septembre de la France. Il marquera les esprits des Français et des Occidentaux pendant longtemps. 


2. Cette attaque odieuse est incontestablement un grand succès pour les terroristes qui l’ont commise. Comme celles du 11-Septembre d’ailleurs. Elle l’est à plusieurs niveaux.
D’abord, il faut reconnaitre que supprimer en quelques secondes quatre dessinateurs qui n’ont jamais été tendre avec l’islam (comme avec le christianisme et le judaïsme), est hélas, quatre fois hélas, une opération réussie sur le plan terroriste. Quoique qu’on dise, l’élimination physique de Charb, Cabu, Wolinski et Tignous est irremplaçable, quel que soit la teneur lyrique de l’hommage que nous entendons.
Ensuite, il faut reconnaitre aussi que le but des terroristes est d’intimider les fidèles de la « liberté d’expression » et les adeptes de la « démocratie ». Là aussi, quoique qu’on dise, tout caricaturiste, journaliste et écrivain engagés, ne peut que penser désormais, consciemment ou pas, à cette attaque odieuse avant la publication de toute caricature, tout article ou tout livre, critiquant l’islam.
Enfin, il faut reconnaitre également que l’objectif des criminels est de terroriser les populations mondiales, occidentales en générale, et française tout particulièrement. Rien qu’à parcourir les réseaux sociaux, on s’aperçoit que cet objectif est atteint en partie.
Avec le 11-Septembre, on a attaqué les symboles de la puissance américaine, commercial et militaire, les World Trade Center et le Pentagone, avec le 7-Janvier, on a attaqué les symboles de la puissance française, culturel et politique, la liberté d’expression et la démocratie.


3. Pour mettre en échec le plan des terroristes, qu’ils soient isolés ou pas, il faut tout d’abord que les criminels, et leurs commanditaires éventuellement, soient traqués, attrapés, jugés, condamnés et mis hors d’état de nuire. Mais, ce n’est pas suffisant. Absolument pas, car cela revient uniquement à rendre la justice et honorer nos morts. Il faut aussi assurer coûte que coûte la relève de Charb, Cabu, Wolinski et Tignous (l'Etat français devra garantir la survie financière du journal après ce coup dur et ceci jusqu'à nouvel ordre!), il faut défendre avec la plus grande fermeté la liberté d’expression dans ce pays, il faut préserver la démocratie de la France, il faut résister aux censeurs de tout poil (aucune religion ne doit être à l’abri de la critique même la plus acerbe, l’islam, pas plus que le christianisme ou le judaïsme ; « Dieu, Allah, Yahvé, Baal ou Bouddha » sont des sujets comme les autres, tout résident sur le sol français doit le comprendre !) et il faut ramener les événements à leurs justes valeurs pour couper court aux délires les plus fous. 


4. Cette attaque terroriste soulève plusieurs questions auxquelles il faudrait apporter une réponse à froid. Tous les défenseurs zélés de la France dont la République française se passerait bien -qu’ils soient en France, au Liban et ailleurs dans le monde- doivent d’ores et déjà savoir qu’ils auront beaucoup du mal à exploiter cet événement tragique, pour monter l’opinion nationale et internationale, contre l’islam et les musulmans. Un nom et une anecdote qui montrent le ridicule de ces zélés, Caroline Fourest a conté à sa manière hier soir un élément clé de l’attaque terroriste, alors que toute la presse ne savait pas grand-chose de l’événement. « Il y avait une jeune journaliste, une jeune contributrice de Charlie Hebdo, qui a eu la kalachnikov sur le nez et il (le terroriste) lui a dit : ‘Récite le Coran et je t’épargne’. Et elle récitait ça en boucle, elle disait : ‘il m’a dit ça, il avait de très beaux yeux bleus, il m’a dit ça’. Ou de très beaux yeux. Je ne sais plus. » Selon la féministe de pacotille et des plateaux TV, la terrorisée journaliste de Charlie, à qui le terroriste islamique a demandé de réciter le Coran, avait de « très beaux yeux bleus », ou elle ne sait plus. Eh bien ma cocotte, pour paraphraser Chevènement, sache « qu’une je-ne-sais-plus, ça sait ou ça ferme sa gueule », surtout devant une tragédie nationale.

Toujours est-il que les éléments en notre procession laissent indiquer que l’attaque de Charlie Hebdo est un acte terroriste isolé, l’œuvre de deux frères français d’une trentaine d’années, d’origine arabe, nés à Paris, et d’un complice de 18 ans, d’origine arabe, sans domicile fixe. Les tueurs ont été identifiés et localisés, en quelques heures seulement, grâce entre autre à une pièce d’identité oubliée dans une des voitures empruntées, ce qui prouve l’amateurisme des criminels en dépit de l’acte de barbarie commis. Au passage, les terroristes se seraient plantés d’immeuble et l’un d’eux a perdu sa chaussure en descendant de la voiture ! Il faudra savoir aussi est-ce que les trois individus aurait pu et dû être surveillés, sachant que l’un des frères était impliqué dans une filière djihadiste vers le Moyen-Orient, démantelé il y a quelques années, interpellé alors qu’il s’apprêtait à partir pour le djihad, et condamné à trois ans de prison ? On doit impérativement comprendre pourquoi la présence policière était réduite au strict minimum alors que le journal est menacé depuis longtemps et qu’il a été attaqué dans le passé avec un cocktail Molotov (2 nov. 2011 à l’occasion de la sortie d’un numéro spécial baptisé « Charia Hebdo », avec Mahomet comme rédacteur en chef), d’où vient leur arsenal de guerre, comment les criminels-amateurs ont pu disparaitre dans la nature alors que l’attaque a eu lieu vers midi dans une capitale truffée de caméras de surveillance où il est difficile de circuler, et au-delà de cette tragédie, mettre en œuvre un plan de désarmement du territoire français ?


5. Pour prévenir ces actes terroristes à l’avenir, il faut agir dans diverses directions : primo, en finir une fois pour toutes avec le berceau de « l’islamisme contemporain » qui affecte l’Europe -directement et indirectement, et l’affectera à l’avenir si rien n’est fait à moyen terme- la Syrie de la tyrannie des Assad ; secundo, anéantir les organisations terroristes qui inspirent l'imaginaire de certains esprits dérangés et alimentent l’islamisme dans le monde (Daech/Etat islamique, Jabhat al-Nosra, Al-Qaeda) et contenir l’hégémonie chiite de la République islamique d’Iran et de la milice du Hezbollah sur les populations arabes (à majorité sunnite) qui nourrit abondamment la rancune des islamistes ; et surtout, tertio, réunir toutes les conditions afin de permettre aux bourgeons du Printemps arabe d’éclore, pour laisser naitre des sociétés démocratiques, condition sine qua non, pour débarrasser ces sociétés arabo-musulmanes des extrémistes islamistes, les usurpateurs de l’islam.


6. Cette attaque odieuse n’est pas sans rappeler à nous autres Libanais, la quinzaine d’attentats terroristes qui ont ensanglantés le Liban entre 2004 et 2013. Pour la comparaison, le modus operandi est un détail qui perd son importance. Idem en ce qui concerne les personnalités visées. Ce qui uni tous les terroristes du monde, c’est une même philosophie mafieuse : l’élimination physique de l’adversaire, cet être qui ne partage pas leurs avis, leurs valeurs ou leurs croyances. Dans ce cadre, je pense notamment à la tragique année 2005, où ont été assassinés Rafic Hariri, ancien Premier ministre du Liban (cinq membres du Hezbollah sont accusés par le Tribunal Spécial pour le Liban de son assassinat), ainsi que Samir Kassir et Gebrane Tuéni, deux des plus brillants journalistes libanais.


7. Cette attaque nous rappelle amèrement la nécessité vitale de combattre tous les extrémistes, qui se nourrissent les uns des autres, qu'ils soient islamistes (sunnites et chiites), islamophobes, (chrétiens et juifs) et tyranniques (régime syrien alaouite et régime iranien des mollahs). Sans la moindre hésitation, nous devons combattre les islamistes avec la même vigueur que nous lutterons contre les islamophobes. Cette affirmation hérissera les poils de ces derniers. Ces deux catégories partagent la même nature fanatique. Ne soyons pas impressionner par les spectacles terroristes, du 11-Septembre ou du 7-Janvier, ou les mises en scènes gore de Daech (Etat islamique) et de Jabhat al-Nosra. Ce qui sépare les islamistes sanguinaires des islamophobes BCBG, c’est tout simplement l’élément déclencheur du passage à l’acte. A la lecture de toute cette violence verbale qui a été déversée sur certains murs Facebook, en France et au Liban, après l’attaque odieuse de Paris - comme ce simple « leur Dieu », deux mots chargés de tant de haine- je me dis qu’un islamophobe BCBG qui sera touché cruellement par un islamiste sanguinaire, lors de l’assassinat d’un de ses proches par exemple, basculera dans le terrorisme à son tour. La guerre civile libanaise, comme la guerre civile syrienne, sont en partie, des guerres de surenchères terroristes, il ne faut jamais l’oublier, le « Samedi noir » n’est qu’un exemple parmi tant d’autres (le massacre en décembre 1975, de centaines de musulmans après le meurtre de quelques chrétiens). En tout cas, une chose est sûre rien n’est plus dangereux qu’un cœur remplit de haine. 


8. Et immanquablement certains « zélés » sont rapidement montés au créneau avec l’indécence qui caractérise les ignares et les haineux : « mais où sont donc les musulmans modérés ? » Personne ne songerait à demander « où sont les Américains modérés » après le bordel déclenché par W au Moyen-Orient, dont on n’a pas encore fini d'en payer le prix, « où sont les Français modérés » après le désastre libyen de Sarkozy et de BHL (Bernard-Henri Levy), « où sont les Libanais modérés » alors que les miliciens du Hezbollah tombent en Syrie « dans l’accomplissement de leur devoir djihadiste », ou « où sont les catholiques modérés » face au scandale de pédophilie qui touchent des membres du clergé ? Certes, on peut reprocher aux communautés musulmanes du monde de ne pas manifester leur désapprobation d’une manière plus tapageuse et ostentatoire, mais ce procès est particulièrement  malhonnête. Comme en témoignent les réactions musulmanes après ce drame. Pour Dalil Boubakeur, le président du Conseil français du culte musulman, recteur de la grande mosquée de Paris, nous sommes face à « une vision absolument erronée, malade, psychopathologique de la religion ». Pour l’imam de Drancy, Hassen Chalghoumi, « Si on n’est pas d’accord avec Charlie Hebdo, on répond au dessin par le dessin, à l’art par l’art, à l’écrit par l’écrit, et pas par la haine et le sang ». Même ceux qui se réclament du « salafisme saoudien » en France, rappellent la mise en garde du grand mufti d’Arabie saoudite à ces coreligionnaires, « le terrorisme de Daech et d’al-Qaïda est l’ennemi numéro un de l’islam »


9. Ceci dit, il serait souhaitable d’une part, que les autorités et les associations musulmanes, chrétiennes et judaïques de France, ainsi que les défenseurs zélés d’Allah, de Dieu et de Yahvé, cessent de poursuivre abusivement en justice, pour un oui et pour un non, ceux qui usent du droit français sacré de la liberté d’expression pour s’exprimer librement sur l’islam, le christianisme et le judaïsme, et d’autre part, que les autorités, les médias et la justice mettent un terme à l’idée répandue en France, à tort ou à raison, dans toutes les confessions confondues, qu’il existe dans ce pays « deux poids, deux mesures ». Rien n’est plus nuisible dans une société, que le sentiment d’être traité avec injustice et discrimination. 


10. En ce jour tragique pour les amoureux de la France et les défenseurs de la liberté d’expression, je me sens doublement concerné et doublement peiné par l’attaque ignoble de Charlie Hebdo. Je voudrais rendre hommage à Charb, Cabu, Wolinski et Tignous, ces quatre dessinateurs morts pour la France et la liberté d’expression, en reprenant un ensemble des dessins de Charlie Hebdo. Certaines caricatures heurteront la sensibilité des hypocrites-défenseurs-zélés-xénophobes-et-islamophobes de Charlie Hebdo et de la France, dont le journal satirique et la République française se passeraient bien. En visionnant ces œuvres inoffensifs pour les croyants sûrs de leurs fois et pour tout esprit sain et équilibré, on se rend compte de la barbarie des tueurs islamistes et la gratuité de leur acte. Le mot de la fin, je l’emprunterai à Victor Hugo. Il résume si bien la nature infâme de certains. « Depuis six mille ans, la guerre / Plaît aux peuples querelleurs / Et Dieu perd son temps à faire / Les étoiles et les fleurs. »


Avertissement
Beaucoup de ceux qui ont écrit sur le sujet, ont été confrontés à la même question : devons-nous reproduire certaines caricatures « offensantes » de Charlie Hebdo pour accompagner un article ou un reportage sur la tragédie du 7-Janvier ? Certains l’ont fait, notamment en France, d’autres pas, notamment aux Etats-Unis. Je fais partie des premiers. J’expliquerai mon choix dans un article à l'avenir.